K’naan

Troubadour

knaan.jpg

A&M Records/Polydor/Universal
Sortie : Mars 2010

Un vent frais souffle sur la scène hip-hop… et non, ce n’est pas aux «vieux» cadors du genre à qui l’on doit cette bouffée d’«airs» vivifiants et revigorants, mais à un Troubadour encore mal connu sous nos latitudes répondant au nom de K’naan. Son deuxième album est un retour aux roots du hip-hop, du temps où il n’était pas encore empesé de chaînes en or et encombré de bling-bling tape à l’œil, mais lorsqu’il était encore le langage de la pauvreté et des laissés pour compte.  

K’naan est un rappeur pas ordinaire, notamment parce qu’il a, à la base, un parcours hors du commun…
Son histoire commence à Mogadishu, en Somalie, à l’époque où il y régnait une guerre civile tellement brutale que les Nations Unies avaient officiellement classé ce pays comme l’un des plus dangereux du monde.
Alors que la situation du pays se détériorait inéluctablement, devenant de jour en jour plus explosive, violente et misérable, le jeune garçon et sa mère parvinrent à s’enfuir et obtenir un visa pour les USA… c’est là, que son autre histoire –l’heureuse- va (re)commencer.
Arrivé aux Etats-Unis, K’naan tombe follement amoureux du hip-hop, apprend tout seul l’anglais en écoutant en boucle les disques de Nas, et au bout de quelques mois, se met déjà à «rimer» comme s’il avait toujours vécu à Brooklyn… Alors oui, en effet (et dans les faits), K’naan est définitivement tout sauf un gars ordinaire !
Bien qu’il ait été élevé d’un un havre de guerre, qu’il ait dû se reconstruire loin de ses racines et s’armer de volonté pour s’adapter et se faire accepter, K’naan, qui se trouve être le petit-fils d’un poète renommé et le neveu d’un célèbre chanteur Somalien, a toujours gardé la musique au fond de son cœur et de son âme…  Peut-être est-ce d’ailleurs la raison pour laquelle son album Troubadourest si puissant, vibrant et, au risque de me répéter, pas ordinaire.  
Comme beaucoup d’artistes déracinés, K’naan est à l’écoute de tout et adapte facilement son flow à toutes les sauces, comme le prouve son nouvel opus.
Sur Troubadour, le rappeur drape ses rimes dans du rap old-school aussi bien que dans de la pop, du rock, du reggae ou tout autre genre… puisque, vous l’avez compris, le gars n’est pas sectaire.  
Ainsi, le morceau “If Rap Gets Jealous” est un brûlot rap/hard-rock où s’enflamment les riffs du guitariste de Metallica, Kirk Hammett. “Fire In Freetown” est une jam infusée de reggae… rappelant étrangement Bob Marley, dans l’aisance qu’il avait à rendre beau n’importe quel combat. “People Like Me” est un pur moment de grand rap, dont l’humour décalé et le flow acrobatique évoquent ceux d’Eminem, alors que “ABCs”, construit autour de synthés mid-90’s et de refrains chantés, crée un environnement parfait pour accueillir les couplets du héro old-school, Chubb Rock.
Mention spéciale à la captivante “Fatima”, une ode à un amour perdu faisant irrémédiablement songer à Wyclef avec ses styles narratifs éclectiques.
Rares sont les albums de hip-hop à varier les plaisirs et capables de plaire à un large public… Troubadour fait définitivement partie de ceux-là !