Dead Obies – Gesamtkunstwerk : tour de force à la Debord

Dead Obies

Gesamtkunstwerk 

Bonsound

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C’est au cœur d’une nouvelle controverse autour du franglais (on leur retire la subvention pour la production de l’album puisque trop anglophone) que Dead Obies fait sa seconde entrée en scène. Un premier album surprenant, deux mixtapes creatives et quelques annonces Kijiji plus tard, Dead Obies est maintenant un groupe phare du hip-hop québécois moderne et son deuxième album, Gesamtkunstwerk, est attendu par de nombreux fidèles.

C’est dans un Centre Phi sold out que le sextuor a notamment enregistré le nouvel opus devant public. Décrit comme un ambitieux album-concept avec La société du spectacle de Guy Debord en trame de fond, Gesamtkunstwerk, dite «l’œuvre d’art totale», s’annonce comme un projet ambitieux qui laisse entrevoir un changement de cap.

Ceux qui étaient ready for the show seront donc finalement servis! Première chose qui saisit sur l’album est la richesse des productions de VNCE. Si Montréal $ud nous avait habitués à des samples et des loops, on retrouve cette même recette gagnante sur cette nouvelle offrande, quoique décidément plus diversifiée et exploratoire. VNCE nous présente des productions de son cru mariées à des effets électro, des reprises et des instruments live, tous judicieusement juxtaposés pour structurer des trames senties, surprenantes et tout à fait dans l’air du temps. Celles-ci font flirter le son DO avec le trap (Moi pis mes homies), l’EDM (Aweille!) et le jazz (Outro).

Grâce à un back-up band, la dimension plus organique vient rehausser les productions en leur donnant une chaleur supplémentaire. Parlant de chaleur, les fans entassés au Centre Phi amènent un élément très intéressant à l’esprit de cet album! VNCE prend le fruit des enregistrements devant public pour isoler leurs voix, commentaires et chants recueillis. Incorporés au produit studio, le tout devient une oeuvre qui sort des sentiers battus et surprend efficacement. Pratiquement certain que Guy Debord serait down avec ça!

Globalement parlant, DO a décidément emprunté une route plus accessible. En ajoutant plus de hooks, structurant davantage les pièces et clarifiant les sons, ils rendent le tout plus facile d’approche pour les non-initiés. À force d’expérimenter en studio, il semble d’ailleurs que les membres aient davantage spécifié leurs rôles: Bear est très efficace pour les refrains, Yes McCan sait mitrailler un flow tight et surprenant sur les verses, Jo RCA ajoute la touche d’agréable arrogance, etc. La chimie est indéniable!

Au passage, un éclectique cocktail de références vient épicer le produit. Il est notamment impossible de nier l’influence sudiste de Travis Scott sur des morceaux comme Explosif et Everyday. Un gros clin d’œil à Ol’ Dirty Bastard et à Jean Leloup est également observé sur l’étrangement surprenante Johnny. Quelques références obscures à notre folklore culturel sauront bien faire sourire ici et là (Steeve Diamond, on te voit!)

Au final, les membres de Dead Obies démontrent qu’ils ne sont pas intéressés à faire le même album deux fois. Gesamtkunstwerk se veut plus accessible par ses structures musicales et plus riche dans ses productions. Le groupe réussit à valser habilement avec d’autres genres musicaux et sait rester fidèle à son côté éclaté, tout en poussant l’expérience dans une nouvelle direction. Même si, tout comme la galette précédente, Gesamtkunstwerk aurait gagné à être plus concis (on parle quand même d’un album de 1h21!), le successeur de Montréal $ud sait répondre aux attentes élevées. Pour reprendre 20some, si l’objectif était simplement «d’y aller pour le swish», Dead Obies aura finalement réussi à faire un solide 3 points au passage!